L'oeuvre de Paul Ricard

La seconde guerre mondiale au Domaine de Méjanes

La guerre éclate et Paul Ricard installe son personnel au Domaine de Méjanes

Nous sommes en septembre 1940.
Paul Ricard est avec ses collaborateurs dans un bistrot de Sainte Marthe à Marseille.
La radio annonce que la fabrication, la vente et la consommation de toute boisson alcoolique de plus de 16° sont désormais interdites sur l’ensemble du territoire français.
Et c’est à ce moment précis que le Domaine de Méjanes entre en scène.
C’est à ce moment précis que Paul Ricard annonce avec sa détermination légendaire à ses employés médusés :
« Nous allons devenir paysans et produire du lait en Camargue ! ».
Paul Ricard installe une partie de ses ouvriers au Domaine de Méjanes. Qui deviennent alors maçons pour y construire leurs maisons avant de construire les abris pour les vaches, les porcs, les moutons qu’ils élèveront. Qui deviennent aussi agriculteurs pour exploiter la terre de Méjanes et ainsi se nourrir, eux et leur entourage.
Vaste programme.
Sur ce Domaine de 1 200 hectares de nature sauvage et salée. Ambitieux programme qui va fonctionner.


Paul Ricard, défricheur des marais.

Nous sommes en 1941.
100 vaches laitières sont acheminées au Domaine de Méjanes.
Qui produisent rapidement 2 500 litres de lait par jour. Soit le quart de ce qu'exige le ravitaillement général pour les enfants des Bouches du Rhône...
Puis les vaches font des petits, qui s'ajoutent à l'élevage des cinq cent porcs, de la volaille, des chevaux de travail...
On passe à la culture des terres. Le matériel agricole n'étant pas approprié, la construction des canaux d'irrigation, les "roubines", est faite à la main. A la pelle. 
Un travail herculéen.
Et pour dessaler, le riz est cultivé. Du maïs aussi. Des arbres fruitiers, des pommes de terre, des légumes sont plantés.
Toute cette production parvient à nourrir l'ensemble des ouvriers de Méjanes, tous les collaborateurs et leurs familles, leurs proches aussi. Le surplus est donné au ravitaillement de la population voisine.
Paul Ricard aimait dire :
"Quelle joie d'avoir pris une terre blanche comme la porcelaine et de l'avoir rendue verte".



Le Domaine de Méjanes nourrit et protège les siens

Nous sommes en 1942. 
En plein cœur de la seconde guerre mondiale. Une vingtaine d’ouvriers vit sur le Domaine de Méjanes.
En plus d’une dizaine de familles. Raoul Schmitt, le régisseur, obtient qu’un instituteur vienne sur le Domaine faire chaque jour, l’école aux enfants. Ce qui nous évite cette folle épopée des trajets en camionnette à gazobois jusqu’à Albaron, avec quinze enfants à bord.
Les gens de Méjanes vivent en totale autonomie. Tout en faisant bénéficier à l’ensemble des collaborateurs de Ricard, à leurs familles, ainsi qu’aux populations avoisinantes, de leur production agricole.
Le jeune fils de Raoul Schmitt est chargé de surveiller l’arrivée des allemands. Au signal, tout le monde se précipite sur le matériel et le cache dans la « Palunette », près du Vaccarès.
Les allemands passent régulièrement à Méjanes se fournir en viande, en lait,... Pour préserver les provisions, le régisseur tient une double comptabilité et fait abattre les porcs et les moutons la nuit.
Le Travail Obligatoire en Allemagne, le STO, commence à sérieusement menacer les jeunes travailleurs sur le Domaine. Paul Ricard, par des subterfuges finement menés avec l’aide d’autres entrepreneurs de la région, réussit à préserver tout le monde… Cette terre de Méjanes nourrit et protège les siens.
Tous ses ouvriers et collaborateurs citadins se re-inventent ici. Une nouvelle vie, un apprentissage sur le tas, la révélation de vocations pour certains. Pour tous en tous cas, l’énergie farouche de faire face et de survivre. Parce qu’il y aura un Après. Meilleur.
Paul Ricard a écrit «si l’on m’interrogeait sur les plus belles années de ma vie, je répondrais que probablement ce furent celles-là, en dépit de la chape de plomb que la guerre faisait peser sur nous. Elles ont donné à ma passion de créer un aliment inépuisable… ».